Carole et Christophe Le Gall ont quitté leur mode de vie citadin et leurs métiers de cadres pour s'installer en maraîchage, il y a dix ans. « Nous voulions changer de vie. Cela rend presque schizophrène de dissocier ses valeurs de ses actes. » affirme Christophe. Un objectif : Agir en adéquation avec leur philosophie de vie. Ce fût alors le « parcours du combattant » pour trouver la ferme de leur rêve. Du Jura Suisse en passant par la Corrèze, le couple a voyagé quelques années avant de trouver le lieu qui répondrait à leurs espérances. Ils sont désormais installés à la ferme des Milles Feuilles en Ille-et-Vilaine sur la commune de Saint-Georges-de Reintembault.
Leur ferme est décomposée en huit jardins, dont trois sur buttes et le couple emprunte beaucoup de principes à la littérature sur la permaculture. Pour Christophe, ces principes répondent d'abord à une éthique. C'est une combinaison de facteurs qui les a décidés à s'installer en maraîchage. Ils souhaitaient avant tout être un modèle pour leurs enfants mais aussi être autonomes en nourriture, prendre soin de la terre et d'eux-mêmes. A partir de ces logiques, « c'était comme une évidence claire et limpide. » Aussi, Christophe est-il persuadé que la vie ne doit pas se réduire à de simples échanges marchands et que l'être humain doit être plus qu'un simple producteur/consommateur. « Nous sommes passés de deux salaires de cadres à un SMIC. Mais c'est désirable de décroître ses besoins lorsque l'on est satisfait de ce que l'on fait. »
Lorsqu'ils se sont installés il y a 4 ans, ils vendaient uniquement le surplus de ce qu'ils produisaient. Ils sont partis de l'existant et de leurs savoir-faire en vendant pain, pesto, gâteaux, tisanes et confitures qu'ils réalisent à partir de leurs productions. Il s'agissait de s’agrandir de « façon organique » en faisant gage de patience. Le but n'étant pas de produire beaucoup mais de produire riche et diversifié. Aujourd'hui, une vente à la ferme a lieu chaque vendredi.
Christophe pense que produire en permaculture c'est créer un système résilient dans lequel chaque élément doit remplir plusieurs fonctions. A titre d'exemple, les plantes telles que la passiflore ou la chayotte sont utilisées en cuisine mais permettent aussi de limiter l'évapotranspiration, d'optimiser l'espace tout en créant de l'ombrage pour les cultures.
Aussi, l'observation du terrain est-elle essentielle à la compréhension du système. Selon lui « la plupart des choses qui se passent lorsque l'on cultive nous échappe. Il y a des boucles de rétroaction et c'est dans l'observation qu'on apprend. »
Le sol n'est pas travaillé et seules de petites poignées de compost -de l'ordre de 30g à l'hectare- sont apportées aux plantes « le sol, ce n'est pas la peine de le gaver » . Ils pratiquent aussi le semis spontané en laissant à la nature le soin de faire sa sélection naturelle. Quant aux autres semences, elles sont achetées à des semenciers non professionnels mais Christophe avoue qu'ils le font « en état de conscience. Je pense qu'en tant que paysan on n'a pas à se soumettre ».
Le principe d'étagement est aussi respecté : des plantes grimpantes à la rhizosphère, tout l'espace est optimisé. Des arbres ont par ailleurs été plantés en réponse au facteur limitant, le vent. Ceux-ci font effet de brise-vent et contribuent à la création d'un micro-climat. Le couple a aussi installé une serre dans une serre afin de créer un micro-climat local pour les cultures de piments, de poivrons ou pour y déposer les semis par exemple.
Claire Gruel, Manon Dupuis et Cyllène Chatellier